Des “guerres nouvelles” ? Permanences et mutations dans l’art de la guerre (1991-2001)

La décennie 1990, très tôt décrite comme celle des grands bouleversements internationaux, a donné lieu, dans le champ de l’histoire militaire, à une conception que l’on pourrait qualifier de « mutationniste ». C’est l’avis de l’historien israélien Martin Van Creveld, pour lequel cette période correspond à une « transformation de la guerre ».
Loin de se contenter de refléter les nouveaux rapports de force géopolitiques nés de l’effondrement de l’URSS et de la fin de la guerre froide, ce dernier annonce une transformation en profondeur de l’art de la guerre dans toutes ses composantes – qu’il s’agisse des technologies, des structures de forces, mais aussi plus fondamentalement encore de la nature des belligérants et même des causes profondes qui poussent les sociétés à entrer en conflit. Assurément, cette thèse d’une mutation aussi radicale gagne à être nuancée : les débats historiographiques, en histoire moderne notamment, autour de la notion de « révolution militaire » ont bien démontré depuis quelques temps déjà que ce type de transformation ne saurait intervenir sans s’inscrire dans le temps long . En dépit de ces précautions d’usage, il apparaît pourtant que la période qui s’étend de la guerre du Golfe au 11-septembre 2001 correspond bien à la cristallisation d’un certain nombre d’évolutions qui, tout en trouvant leurs origines dans des époques antérieures, apparaissent alors au grand jour. Ce jeu de transformation repose sur deux pans : d’une part une « révolution » de l’art occidental de la guerre, qui, sous l’impulsion américaine, embrasse le tournant radical des nouvelles technologies de l’information ; d’autre part l’évolution de la conflictualité dite « irrégulière » à travers les guerres civiles et le terrorisme. C’est la conflagration de ces deux trajectoires qui aboutit dès le 11-septembre 2001 à la situation stratégique dont nous sommes encore aujourd’hui très largement tributaires.
Contenu disponible en :
Régions et thématiques
Utilisation
Comment citer cette publicationPartager
Centres et programmes liés
Découvrez nos autres centres et programmes de rechercheEn savoir plus
Découvrir toutes nos analyses2001-2025 : guerre globale contre le djihadisme
Malgré des moyens considérables dédiés à la guerre globale contre le terrorisme, la menace djihadiste n’a pas disparu.
L’Iran face à ses limites : 10 points sur les causes structurelles d’une cassure tactique
Proxies régionaux. Soutien de Moscou. Latence nucléaire. Dissuasion balistique. L’équilibre sur lequel Téhéran avait bâti sa doctrine a chancelé — avec une rapidité impressionnante. Une semaine après l’annonce d’un cessez-le-feu entre l’Iran et Israël, il est possible de dresser un bilan détaillé des raisons structurelles qui ont permis à Tel Aviv de déjouer les plans de la République islamique et de dégager des perspectives.
Repenser la fonction « Protection – Résilience ». Un nécessaire changement de paradigme face à un environnement qui se durcit
La France comme les autres pays européens est confrontée de manière directe, tout particulièrement depuis le début de la guerre en Ukraine, à une stratégie hybride de déstabilisation mise en œuvre par la Russie. Cette stratégie se matérialise dans l’ensemble des champs et des milieux possibles d’affrontement et a pour objectif, outre de saper le soutien occidental à l’Ukraine, d’affaiblir les pays européens avec lesquels la Russie se perçoit dans une confrontation systémique de long terme.
Réformer les commandements de l’OTAN. Entre européanisation, émergence de nouveaux leaders et rôle des États-Unis
Au moment où le Sommet de l'OTAN se tient à La Haye du 24 juin au 25 juin 2025, la réélection de Donald Trump à la présidence américaine interroge profondément la nature du lien transatlantique. Si les garanties de sécurité de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), article 5 et dissuasion nucléaire notamment, ne sont pour l’instant pas officiellement remises en cause ou amoindries, des projets de la nouvelle administration portent sur le désengagement de fonctions au sein de l’Alliance, en particulier le poste de SACEUR (Supreme Allied Commander Europe).