En Mongolie intérieure, l'intrigante réplique chinoise d'un quartier stratégique de Taipei
L'armée chinoise utilise au sein de sa base d'entraînement de Zhurihe, dans la région autonome de Mongolie intérieure, une réplique partielle du quartier présidentiel de la capitale taïwanaise. De quoi nourrir l'hypothèse d'une invasion de l'île ?
Située à 400 km au nord-ouest de Pékin, la base d'entraînement de Zhurihe est un modèle du genre. Ses 1 066 kilomètres carrés en font la plus grande base du pays et même, selon le régime chinois, de toute l'Asie. C'est ici, au milieu des vastes plaines de Mongolie intérieure, que l'Armée populaire de libération (APL) se prépare depuis plus de trente ans aux « guerres du futur » dans des exercices grandeur nature
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Un tunnel de 280 mètres
Depuis les premières images de la CCTV, cette reproduction de la zone spéciale de Bo'ai, le quartier gouvernemental de Taipei, s'est considérablement étoffée. Selon de nouvelles photos satellites obtenues par l'Institut japonais des principes fondamentaux nationaux (JINF), un cercle de réflexion basé à Tokyo, et relayées mercredi 1er octobre par le quotidien ultraconservateur Sankei Shinbun, sa superficie a triplé en cinq ans.
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L'hypothèse 2027
La copie de la zone spéciale de Bo'ai annonce-t-elle une offensive imminente à la manière de la maquette américaine, ou bien est-elle vouée à ne rester qu'un simple terrain d'entraînement comme la reproduction nord-coréenne ? Voilà dix ans que la question revient tel un refrain sans jamais trouver de réponse. Pour Taïwan, en tout cas, la menace se précise. Dans un document du ministère de la Défense rendu public en mars dernier, Taipei a identifié l'année 2027 comme présentant un risque élevé d'invasion.
Cette évaluation était à la fois basée sur les chiffres américains de la production militaire chinoise et sur un discours du président Xi Jinping fixant 2027, l'année du centenaire de l'Armée populaire de libération, comme celle au cours de laquelle elle devait devenir une force « moderne ». L'APL pourrait alors compter sur l'appui de la Russie. Des documents divulgués fin septembre par le think tank britannique RUSI indiquent que Moscou a accepté de l'équiper et de la former pour des opérations aéroportées.
Marc Julienne, directeur du centre Asie à l'Institut français des relations internationales (Ifri), juge la date « plausible ». En cause, selon lui, le 21e Congrès du Parti communiste chinois au cours duquel Xi Jinping se présentera, selon toute vraisemblance, pour un quatrième mandat. « Or, il se trouve que son bilan, particulièrement sur le plan économique intérieur, n'est pas brillant. De nombreux signaux indiquent une certaine fébrilité politique, et même un manque de confiance d'une partie de l'armée à son égard. Dans un tel contexte, on peut donc imaginer Xi Jinping utiliser Taïwan comme diversion pour se maintenir au pouvoir », avance le chercheur.
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Guerre psychologique
Une certitude pour les deux experts interrogés par RFI : la réplique partielle de Bo'ai constitue l'une des nombreuses manœuvres du régime chinois dans sa guerre psychologique contre Taipei. Celle-ci revêt des formes multiples. Cyberattaques, désinformation massive sur les réseaux sociaux et dans certains médias traditionnels, incursions aériennes et maritimes, espionnage, corruption… tout est bon pour saper le moral de la population taïwanaise et la pousser dans les bras de Pékin qui considère l'île comme chinoise.
Gagner sans combattre : la stratégie opérée par Pékin s'inscrit dans la droite ligne de celle professée par Sun Tzu au VIe siècle avant notre ère.
« C'est de l'intimidation, estime Marc Julienne. Les Chinois savent pertinemment que ce type d'infrastructure va être détecté par les puissances étrangères, y compris Taïwan. Pour ceux qui connaissent Taipei, ces entraînements contre des bâtiments facilement identifiables rendent donc la menace beaucoup plus concrète. »
Selon le chercheur, la réplique du quartier présidentiel pourrait également contribuer à l'endoctrinement des militaires chinois.
« L'Armée populaire de libération, qui est celle du Parti communiste chinois, accorde une place importante à la formation idéologique de ses soldats en leur fixant de grandes missions : protéger le territoire, bien sûr, la population, le Parti… Mais aussi parachever l'œuvre de Mao Zedong en intégrant Taïwan à la Mère Patrie. » - Marc Julienne, Directeur du Centre Asie de l'Ifri.
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> Lire l'article complet sur le site de RFI.
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