Offensive terrestre d’Israël à Gaza : "Une volonté de fait accompli"… Netanyahu cherche-t-il l’annexion du territoire ?
ENTRETIEN. À l’aube, ce mardi 16 septembre, Israël a déclenché une offensive terrestre majeure à Gaza-ville. Décryptage de la situation avec Dorothée Schmid, responsable du programme Turquie/Moyen-Orient de l’Ifri.

Comment analysez-vous le moment choisi par Israël pour lancer cette offensive terrestre sur Gaza-ville, alors que Marco Rubio, secrétaire d’Etat américain, venait à peine de quitter le pays ?
DOROTHEE SCHMID : Ça veut dire que le gouvernement israélien considère avoir reçu des assurances de soutien de la part des États-Unis. Il faut aussi avoir en tête qu’on est dans un timing qui précède la grande réunion de l’Assemblée générale des Nations Unies où la France va annoncer la reconnaissance de l’État palestinien, avec d’autres pays qui vont suivre (le 22 septembre, NDLR). Il y a donc une forte nervosité politique des Israéliens et une volonté de fait accompli pour démontrer que les territoires palestiniens ne sont pas des lieux viables, des lieux où une solution politique peut être recherchée.
Est-ce que ce soutien indéfectible des États-Unis, c’est avant tout celui de l’administration Trump ?
Le soutien à Israël est une ligne rouge dans l’histoire américaine. C’est un fil qui tient toujours. Néanmoins, on a le sentiment qu’il y avait dans la précédente administration, même si elle n’a pas eu beaucoup de réussite, cette volonté d’essayer de maintenir un environnement diplomatique avec un travail de négociation. Notamment avec les pays qui ont déjà fait la paix avec Israël (Egypte, Jordanie). Tel-Aviv a compris que depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, le Proche-Orient a été dégradé dans les priorités américaines car Donald Trump veut montrer qu’il est un président qui peut faire la paix. Mais il a vite compris que la situation était inextricable.
Le Forum des familles des otages du 7-Octobre, détenus par le Hamas, reproche à Benyamin Netanyahu de tout faire pour ne pas parvenir à un accord afin de les faire revenir. Est-ce le reflet d’une fracture interne dans la société israélienne à propos de la Palestine ?
Il y avait d’autres fractures avant le 7-Octobre sur les réformes de la justice que voulait Benyamin Netanyahu. Il y a certes un début de fracture sur le sujet mais en Israël, la question palestinienne, chez les plus pacifistes, est envisagée presque uniquement sous l’angle de la libération des otages. Ces fractures, le Premier ministre considère qu’elles sont surmontables, et que la potentielle perte des otages, c’est un dommage collatéral dont il serait possible de passer à autre chose par la suite.
L’ONU accuse Israël de génocide dans la bande de Gaza, est-ce que cela peut influer la politique d’Israël ?
Je ne crois pas que l’ONU puisse avoir de prise. Mais il y a un vrai sujet sur l’opinion publique mondiale et la dégradation extrêmement forte de l’image d’Israël aujourd’hui qui aura des conséquences diplomatiques probablement à terme. Mais pour l’instant, Israël montre qu’il y a deux camps et que dans le sien figurent les États-Unis, la première puissance mondiale. L’administration Trump a déjà eu l’occasion de montrer toute son aversion pour les Nations Unies. Les deux diplomaties sont aujourd’hui parfaitement alignées.
Dans ce contexte, le risque de voir Israël annexer complètement Gaza est-il prégnant ?
Peut-être pas une annexion, mais une occupation, c’est très probable. Des plans de reconstruction du territoire un peu délirants sont partagés avec les Américains. La vraie transgression, ce serait si l’administration américaine se plaçait aux côtés d’Israël pour encourager ce fait accompli non seulement de l’occupation, mais de la reconstruction selon les désirs d’Israël.
-> Lire l'article sur le site de La Dépêche.
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