Qu’entend Trump en parlant de tester ses armes nucléaires ?
Le président américain a demandé jeudi au Pentagone de «commencer à tester» les armes nucléaires des États-Unis. Ses déclarations sèment la confusion.
 
En disant vouloir tester les armes atomiques américaines, Donald Trump plonge le monde dans la perplexité, ses déclarations semblant ouvrir la porte à une reprise par Washington des essais nucléaires, ce qui provoquerait un bouleversement mondial.
Experts comme gouvernements ne comprennent pas ce que le président américain a voulu signifier en annonçant jeudi qu’«en raison des programmes d’essais menés par d’autres pays, j’ai demandé au Ministère de la guerre de commencer à tester nos armes nucléaires sur un pied d’égalité».
Dans un deuxième temps, il a développé devant la presse, jugeant que ses grands compétiteurs, Chine et Russie, «font apparemment tous des essais nucléaires», et que «s’ils font des essais, j’imagine qu’on doit en faire».
Trois hypothèses sur l’annonce de Trump
Les deux rivaux de Washington ont réagi promptement, Pékin exhortant les États-Unis à respecter «sérieusement les obligations du traité d’interdiction complète des essais nucléaires», le TICE, Moscou soulignant de son côté que le test de son dernier missile de croisière à propulsion nucléaire ne constituait pas un essai nucléaire.
Qu’a pu vouloir dire Donald Trump? Deux éminents experts interrogés par l’AFP avancent trois principales hypothèses, allant d’une réaction aux récentes innovations militaires russes à l’annonce d’une reprise à venir des essais, qui ferait basculer le monde dans un nouvel âge nucléaire.
« Soit il parle de tester des missiles, mais les États-Unis le font déjà, soit il parle des tests dits “sous-critiques”, mais je ne pense pas qu’il maîtrise ce degré technique, soit il parle de vrais essais, mais personne ne le fait à part la Corée du Nord », qui a procédé à six essais nucléaires entre 2006 et 2017, résume Héloïse Fayet, chercheuse sur la dissuasion à l’Institut français des relations internationales (Ifri).
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Les essais nucléaires « sous-critiques »
États-Unis, Russie et Chine ne suivent pas tous les mêmes règles d’interdiction des essais nucléaires. Schématiquement, Washington se restreint plus que ses rivaux dans les petits tests, appelés « sous-critiques », autorisés par le TICE.
Ce traité « interdit les essais nucléaires de toute sorte au-delà d’un certain dégagement d’énergie. On est quasiment sûrs que la Russie et la Chine font des essais sous-critiques qui ont un certain dégagement d’énergie, mais restent dans la limite », explique Mme Fayet, « tandis qu’aux États-Unis, ils procèdent à des tests sous-critiques plus restrictifs, sans aucun dégagement d’énergie, aucune chaleur, aucune réaction critique ».
Les tests de Moscou et Pékin resteraient indétectables «grâce au concept de couplage: vous faites une chambre souterraine installée dans une autre chambre souterraine, ce qui rend très difficile la détection extérieure des petites explosions», explique M. Alberque.
Donald Trump pourrait exiger de se mettre à niveau, « mais c’est un sujet extrêmement compliqué et je ne sais pas s’il entre dans ce degré de subtilité », juge Mme Fayet.
Reprise des essais nucléaires
Dernière hypothèse, maximaliste: la reprise des tests proprement dits. « Il y a depuis longtemps chez les Trumpistes la volonté de reprendre les essais », explique Mme Fayet, et ce malgré l’intérêt limité, Washington ayant, comme les autres puissances, un programme de simulation efficace.
«L’Amérique doit se préparer à tester ses armes nucléaires», plaidait par exemple en janvier le puissant laboratoire d’idée trumpiste Heritage Foundation.
Selon Mme Fayet, « le seul intérêt serait politique, en vue de pousser à une négociation avec les Russes et les Chinois » pour tenter d’obtenir un accord tripartite de contrôle des armements, dont l’architecture internationale est moribonde (le dernier accord liant Moscou et Washington, New Start, expire en février).
Une posture à risque. Moscou et Pékin n’attendent qu’une chose: que Washington fasse détoner une charge, pour pouvoir suivre le mouvement. «Nous savons avec certitude que certaines personnalités à Washington envisagent déjà la possibilité de procéder à des essais réels de leurs armes nucléaires», a déclaré Vladimir Poutine en 2023, ajoutant que «si les États-Unis effectuent des essais, nous en ferons autant».
> Lire l'article dans son intégralité sur le site de 24 heures.
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