Histoire d’une guérilla fantôme. Le(s) Front(s) de libération de l’enclave du Cabinda
Depuis plus d’un demi-siècle, dans l’indifférence quasi-générale des médias et de la communauté internationale, un conflit larvé perdure au Cabinda, petit territoire angolais enclavé entre le Congo-Brazzaville et la République démocratique du Congo.
Jadis appelée Congo Portugais, cette anomalie historique et géographique, surnommée « Koweït africain » du fait de ses vastes ressources pétrolières n’a cessé de susciter les convoitises et velléités annexionnistes de puissances régionales et internationales depuis le XVIe siècle.
Entourée de mystères, sa forêt tropicale – le massif forestier du Mayombe – abrite l’un des rares mouvements de libération toujours actifs depuis les luttes d’indépendance : le Front de libération de l’enclave du Cabinda (FLEC). Ce mouvement est un héritier de la lutte anticoloniale qui n’a cessé de défier l’histoire. Ayant d’abord lutté contre l’Empire portugais, le FLEC est né en 1963 dans l’effervescence des indépendances de la sous-région et il a été pris dans les stratégies des acteurs régionaux et internationaux au point de devenir la victime collatérale de l’indépendance de l’Angola en 1975. Il lutte maintenant contre l’une des armées les plus puissantes et aguerries d’Afrique, les Forces armées angolaises (FAA).
Le conflit opposant le mouvement séparatiste cabindais au régime angolais remonte à l’indépendance de l’Angola en 1975. S’il est vrai que l’éclatement du mouvement en dizaines de factions tantôt rivales, tantôt alliées, a singulièrement compliqué toute tentative de médiation, la mauvaise foi du régime angolais, qui n’a jamais véritablement tenu à chercher une solution négociée, et le manque d’intérêt de la communauté internationale ont aussi compromis les efforts de paix. En effet, des décennies de luttes intestines recoupant des clivages ethniques, religieux et linguistiques, le jeu politique régional et les cooptations par Luanda ont abouti à une ultra-fragmentation du FLEC originel en une cinquantaine de mouvements qui lui sont associés de près ou de loin.
Malgré d’importants revers au début de ce siècle et un contexte sous-régional défavorable, la rébellion a fait preuve d’une grande résilience. Depuis le début 2016, on observe une recrudescence des combats, avec notamment un raid mené contre une plateforme pétrolière au large de l’enclave à la fin du mois de mai 2016. En dépit de cette résilience, les deux constantes historiques du FLEC demeurent : une ultra-fragmentation illustrée par la querelle consécutive à la mort en juin 2016 du leader historique du FLEC-FAC, Tiago Nzita, et une grande dépendance vis-à-vis du contexte régional. Cette note retrace le parcours méconnu et complexe de ce mouvement ultra-fragmenté au gré des évolutions régionales et internationales.
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