Exploit humanitaire ou échec ? La crise des réfugiés en Allemagne et en Europe
Depuis l’été 2005, la République fédérale est confrontée à un afflux massif de personnes cherchant protection, venant principalement de Syrie, d’Irak et d’Afghanistan. Cet afflux de migrants est devenu le sujet dominant de la vie politique et sociale. L’attitude à adopter à l’égard des réfugiés a donné lieu à des prises de position de plus en plus conflictuelles. Le climat social qui entoure la crise des migrants est devenu beaucoup plus sombre, et l’atmosphère politique plus rude.
L’une des solutions européennes préconisées par le gouvernement fédéral s’est avérée jusqu’à présent difficile à mettre en œuvre. Celle-ci consisterait à répartir de manière plus juste les demandeurs d’asile entre les différents États membres de l’UE. Le système européen de répartition des responsabilités dit « Dublin III », qui n’était qu’en partie fonctionnel, s’est totalement effondré. La situation a ensuite été globalement celle d’un afflux non maîtrisé de migrants vers l’Allemagne, qui a dû accueillir les réfugiés par centaines de milliers. En dehors de l’Allemagne, seul un petit nombre d’États européens l'a fait dans des proportions conséquentes. Dans un contexte marqué par une crise économique persistante et de récents attentats terroristes, bien peu d’États européens sont disposés à prendre part à une solution européenne. Prenant la suite de la crise de l’euro, la crise des réfugiés met ainsi à rude épreuve la communauté des États européens. Les chiffres ont diminué sensiblement à partir du mois de février, après que la route des Balkans a fait l’objet d’une fermeture progressive. Il reste à voir dans quelle mesure les accords avec la Turquie constitueront une solution durable. Il est vraisemblable que les réfugiés emprunteront d’autres routes, au moins pour une partie d’entre eux.
Pour l’Allemagne, l’importance de ce nouvel afflux migratoire constitue un défi sociétal immense. En grand nombre, les réfugiés resteront assez longtemps, ou même s’établiront durablement. D'un côté, il s’agit d’un atout face au déclin démographique de la société allemande et d’un manque croissant de main-d’œuvre. D’un autre côté, se profile un travail d’intégration immense si l’on veut préparer des centaines de milliers de personnes, à la culture et aux attentes très éloignées des nôtres, à entrer sur le marché du travail et à participer à la vie sociale du pays. La situation sur le marché du travail et le régime politique d’intégration sont devenus certes plus favorables, mais le phénomène est sans doute voué à durer, et très probablement à se heurter à des réactions hostiles au sein de la société.
Marcus Engler est consultant pour le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Il est membre de la rédaction du Réseau de recherche sur les réfugiés et du Réseau Migration en Europe.
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