La rentrée sous haute tension de la diplomatie française : Ukraine, Palestine ou relations avec les Etats-Unis
En cinq jours, le Quai d’Orsay a convoqué coup sur coup les ambassadeurs des États-Unis et de l’Italie, afin de protester contre la remise en question de projets portés sur la scène internationale par Emmanuel Macron.

Tandis que le président de la République, Emmanuel Macron, se veut aux avant-postes pour peser sur les deux principaux conflits du moment, l’Ukraine et la guerre à Gaza, les relations se crispent avec de vieux alliés de la France, les Etats-Unis et l’Italie. En cinq jours, le Quai d’Orsay a convoqué coup sur coup les ambassadeurs de ces deux pays en guise de protestation contre la remise en question de projets portés par le chef de l’Etat, parfois contre l’avis de ces partenaires de longue date, désormais dirigés par des gouvernements aux positions idéologiques, voire géopolitiques, souvent aux antipodes des siennes. Pour la diplomatie française, c’est une rentrée sous haute tension.
Les frictions portent sur deux projets emblématiques. D’abord, la volonté des autorités françaises de reconnaître, contre l’avis d’Israël et de Washington, l’Etat de Palestine lors de la prochaine Assemblée générale des Nations unies, en septembre, à New York. Lundi 25 août dans l’après-midi, l’ambassadeur des Etats-Unis à Paris, Charles Kushner, auteur la veille d’un courrier accusant cette initiative de nourrir la montée de l’antisémitisme, s’est fait représenter au Quai d’Orsay par son chargé d’affaires. Ce dernier a été reçu par deux hautes fonctionnaires.
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Autre sujet sensible, le déploiement de troupes européennes en Ukraine, censé dissuader le Kremlin de lancer de nouvelles offensives, en cas de cessation des hostilités – une hypothèse au cœur des discussions en cours entre les soutiens de Kiev face à la Russie, mais dénoncée par le vice-président du conseil italien, Matteo Salvini (Ligue, extrême droite). Cet allié de la première ministre, Giorgia Meloni, avait ironisé, le 20 août, contre une telle perspective. « Vas-y toi, si tu veux. Tu mets le casque, le gilet pare-balles, le fusil et tu pars », avait-il lancé à l’intention du président français, après l’avoir déjà traité de « fou » en mars.
Le lendemain, l’ambassadrice italienne, Emanuela D’Alessandro, était convoquée au Quai d’Orsay pour un entretien qualifié de « franc » avec le directeur chargé de l’Europe, ce qui n’a pas empêché M. Salvini, lui-même admirateur du président russe, Vladimir Poutine, avant l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par Moscou, de répéter ses propos presque mot pour mot samedi.
Echanges acrimonieux
Ces épisodes donnent une idée de l’âpreté des débats au sein du camp occidental, dont la cohésion est mise à mal.
« Les deux cas sont différents, mais leur point commun est qu’ils touchent aux éléments les plus sensibles de la politique étrangère française du moment », dit Thomas Gomart, le directeur de l’Institut français des relations internationales.
Pour lui, « Matteo Salvini n’en est pas à son coup d’essai, et l’idée des autorités françaises est de contrer très vite son discours, après que Giorgia Meloni a fait le voyage de Washington, le 18 août, avec d’autres dirigeants européens, aux côtés de Volodymyr Zelensky et d’Emmanuel Macron, dans un moment d’unité fragile, mais essentielle pour le Vieux Continent ».
Le cas Kushner est d’une autre nature, selon M. Gomart, alors que ce proche de Donald Trump, beau-père de sa fille Ivanka et ancien promoteur immobilier condamné pour malversation fiscale, effectue ses premiers pas de diplomate à Paris, où il n’a pris son poste qu’en juillet.
« La réaction des autorités françaises exprime leur volonté de donner un coup d’arrêt aux tentatives d’ingérence américaines que l’on redoute à Paris et de faire comprendre à cet ambassadeur que la scène politique française, dans un pays très soucieux du sort de la plus grande communauté juive continentale, n’est pas celle des Etats-Unis », observe-t-il.
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