L’Asie stratégique, de l’Inde au Pacifique
Nucléarisation nord-coréenne, militarisation d’îlots par la Chine en Asie du Sud-Est, durcissement des revendications territoriales de l’Asie du Nord-Est à l’Asie du Sud, persistance d’actes terroristes, mutation des moyens d’influence diplomatico-militaires, émergence des menaces cyber : l’Asie, de l’Inde au Pacifique, présente un environnement stratégique dangereux, complexe et mouvant.
La militarisation des acteurs de la région nourrit de nouveaux dilemmes de sécurité. Le développement des coopérations de défense et partenariats stratégiques visent autant à renforcer les relations bilatérales qu’à influer sur l’équilibre des forces régionales. Ces transformations se produisent à l’échelle d’un système de sécurité indo-pacifique caractérisé par des problématiques de sécurité maritime majeures. La montée en puissance de la Chine et son expansion multiforme y est un facteur structurant, tout comme l’engagement de sécurité américain, qui forme toujours la base d’un système d’alliances et de partenariats régional qui pallie à l’absence toujours remarquable de mécanisme de sécurité collective. L’hétérogénéité des acteurs engagés ajoute enfin un niveau de complexité : des mastodontes chinois et indiens aux Etats insulaires de l’océan Indien et du Pacifique, des démocraties aux régimes autoritaires et totalitaires, des Etats ultra-connectés aux régimes quasi-autarciques, des capacités militaires croissantes des Etats d’Asie du Sud-Est aux équipements high-tech du Japon et de la Corée. Le renouveau des tensions interétatiques ces dernières années se tient dans un contexte de grande diversité et d’asymétries qui exacerbe les suspicions, nationalismes et rivalités. Dans ce cadre, même les moyens traditionnels de construction de la confiance, comme la diplomatie navale, servent de manière croissante à étoffer l’éventail des mesures de dissuasion.
L’objectif de ce numéro de la RDN n’est toutefois pas d’analyser les recompositions du paysage géopolitique dans la zone indo-pacifique. L’exercice a déjà donné lieu à maintes publications, notre propos est résolument ailleurs. Traiter des problématiques strictes de sécurité et de défense en Asie permet de resserrer l’analyse et d’apporter des éclairages sur un ensemble de phénomènes et d’enjeux qui rendent compte de l’hétérogénéité des stratégies, et de leurs implications en termes d’acquisition et de coopération de défense. L’examen des grands enjeux stratégiques asiatiques conduit à plusieurs constats : sans surprise, la Chine est aujourd’hui devenu un acteur politico-militaire incontournable. Expansion maritime, contrôle et déni d’accès, dissuasion stratégique, guerre hybride, lutte anti-terroriste, diplomatie de défense proactive : la nouvelle puissance militaire chinoise change la donne et pousse les pays de la région à adapter leur stratégie de sécurité et moderniser leur capacité militaire en regard. Deuxième constat : la réaffirmation du rôle de la puissance nucléaire. Aux Etats-Unis, en Chine, en Corée du Nord, au Pakistan : l’arme nucléaire reprend une place centrale dans les stratégies de dissuasion, renforçant l’instabilité et les risques d’escalade. Troisième constat : les problématiques de sécurité maritime gagnent en importance. Revendications territoriales, multiplication des sous-marins et enjeux de la surveillance sous-marine, problématiques de sécurité non-traditionnelles également, avec les questions environnementales et la piraterie : avoir la capacité de surveiller ses eaux territoriales et pouvoir assurer la liberté de navigation dans les eaux internationales sont devenus des conditions sine qua non pour faire respecter sa souveraineté et contribuer à la stabilité régionale. Enfin, la persistance de la problématique terroriste et l’expansion des rivalités dans de nouveaux domaines comme le cyberespace sont aussi évoqués dans ce numéro, qui reflète imparfaitement la variété des défis de sécurité auxquels les Etats de la région doivent faire face.
Les 22 articles de ce numéro d’été de la RDN préparés par l’Institut de recherche de l’Ecole militaire (IRSEM) et l’Institut français des relations internationales (IFRI) se veulent donc un témoignage (non exhaustif) de la richesse, du dynamisme et de la variété de l’expertise sur l’Asie. Nous nous sommes attachés à refléter la diversité des points de vue des universitaires, think tankers, praticiens de la diplomatie et de la défense, tout en incluant les regards asiatiques de trois grand partenaires stratégiques de la France dans la région : l’Australie, l’Inde et le Japon.
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