Le rôle clé de la Chine dans les chaînes de valeur des minerais critiques
La Chine occupe aujourd’hui une position dominante dans les chaînes de valeur des minerais critiques, de l’extraction à la transformation jusqu’aux technologies en aval. Cette suprématie repose sur des décennies de politiques industrielles et lui confère une influence stratégique considérable sur la sécurité d’approvisionnement mondiale, notamment pour l’Union européenne.
Pékin a su capitaliser sur ses avantages en amont pour renforcer sa compétitivité industrielle, tout en demeurant vulnérable à une forte dépendance aux importations pour plusieurs minerais qu’il considère stratégiques. Depuis 2023, la Chine a introduit des restrictions à l’exportation de matières premières et de technologies, exploitant des effets de goulots d’étranglement afin de servir ses objectifs géopolitiques. Face à ces pratiques, l’Europe tente de diversifier ses approvisionnements, mais se heurte à la capacité de Pékin à influencer l’offre, les prix et les flux d’investissements.
Introduction
La Chine domine aujourd’hui des chaînes de valeur de nombreux minerais critiques, de l’extraction à la transformation jusqu’aux technologies en aval, suscitant de vives inquiétudes en matière de sécurité des chaînes d’approvisionnement pour la France, l’Union européenne et leurs partenaires mondiaux. Cette position repose sur des décennies de politiques industrielles, notamment la stratégie Made in China 2025, adoptée désormais il y a plus d’une décennie. Cet ensemble de stratégies visent à assurer une croissance économique et une prospérité durables pour le pays grâce au développement de positions de leadership dans des secteurs émergents ou nouvellement stratégiques, allant des technologies décarbonées pour la transition énergétique à la fabrication avancée, en passant par l’économie numérique et les technologies de santé.
Plus que tout, la stratégie chinoise portant sur l’amont des chaînes de valeur consiste à garantir la sécurité des chaînes d’approvisionnement et à renforcer la compétitivité des industries en aval (Seaman, 2025). Dans un contexte de méfiance stratégique vis-à-vis des puissances occidentales, notamment les États-Unis, et d’incertitude quant à la capacité de l’ordre économique libéral à continuer de servir les intérêts chinois (Economy et Levy, 2014), la question de la sécurité des ressources et de la dépendance technologique chinoise a été et reste toujours un moteur essentiel de la politique industrielle de Pékin, et informe sa stratégie globale. Elle s’inscrit également dans une volonté clairement affirmée de dominer et maîtriser les marchés des technologies clés pour l’avenir pour conquérir le leadership géopolitique mondial. Une telle approche a historiquement contrasté avec les logiques plus libérales, guidées par le marché, ainsi que les pressions sociales et environnementales qui ont pesé sur les industries extractives en Occident, renforçant en fin de compte la position dominante de la Chine dans l’extraction et / ou la transformation (Humphreys, 2015).
Aujourd’hui, à mesure que les tensions géopolitiques s’exacerbent et que les grandes puissances mondiales, notamment les États-Unis, cherchent à utiliser la domination des chaînes d’approvisionnement à des fins politiques plus larges, y compris dans le cadre de la compétition stratégique avec la Chine, Pékin n’hésite plus à utiliser ses positions oligopolistiques ou monopolistiques dans les chaînes de valeur des minerais critiques comme armes géopolitiques. Ce mouvement a entraîné des efforts de diversification des chaînes d’approvisionnement, y compris de la part de la France et de l’Union européenne, mais l’ampleur de la domination chinoise et les outils dont Pékin dispose pour influencer l’offre et les prix compliquent considérablement ces initiatives.
Bilan des forces et faiblesses de la Chine dans les chaînes de valeur
Dans les chaînes de valeur des minerais considérés comme « critiques » ou « stratégiques » par la France et l’Union européenne, la domination actuelle de la Chine se manifeste dans trois domaines : l’extraction des minerais, la transformation des minerais et les technologies de transformation. La définition européenne de la criticité est souvent, mais pas exclusivement, liée aux risques d’approvisionnement associés au contrôle exercé par la Chine sur la chaîne de valeur.
[...]
> Lire l'article dans son intégralité publié dans la revue « Réalités Industrielles » des Annales des Mines, Novembre 25.
Centres et programmes liés
Découvrez nos autres centres et programmes de rechercheEn savoir plus
Découvrir toutes nos analysesCrise politique en Thaïlande : la tactique du chaos
La Thaïlande a replongé à l’été 2025 dans une crise politique profonde. La suspension de la Première ministre, Paetongtarn Shinawatra, par la Cour constitutionnelle a provoqué l’implosion de la coalition au pouvoir. Cette crise ressemble pourtant aux précédentes. Une banalité répétitive qui interroge à la fois le sens des responsabilités des principaux dirigeants et qui génère au sein de la population un cynisme mâtiné de résignation.
Ouverture du G7 à la Corée du Sud : relever les défis mondiaux contemporains
L'influence mondiale du G7 s'est affaiblie à mesure que des puissances telles que la Chine remodèlent la gouvernance internationale à travers des initiatives telles que les BRICS et l'Organisation de Coopération de Shanghai (OCS). Le G7 ne représentant plus aujourd'hui que 10 % de la population mondiale et 28 % du PIB mondial, sa pertinence est de plus en plus remise en question.
Cambodge-Thaïlande : un accord de paix en trompe-l’oeil
Après le Moyen-Orient, Donald Trump a vu en Asie du Sud-Est une nouvelle opportunité de consolider son image de président faiseur de paix. Confirmée à la dernière minute par la Maison-Blanche, sa participation au sommet de l’Association des Nations d’Asie du Sud-Est (ASEAN) a ainsi été conditionnée à l’organisation en grande pompe d’une cérémonie de signature d’un accord de paix entre le Cambodge et la Thaïlande.
Un an de présidence Prabowo : entre populisme économique et reflux démocratique
Élu à presque 60 % des suffrages en février 2024, Prabowo Subianto est officiellement devenu le huitième président de la République indonésienne le 20 octobre 2024. Adoubé par son prédécesseur et ancien rival, Joko « Jokowi » Widodo, porté par une immense popularité, en particulier auprès de la jeunesse, le nouveau chef de l’État n’a pas tardé à mettre en œuvre son programme pour une « Indonésie qui avance » (Indonesia Maju).