Le Frelimo, trente ans après les « réformes démocratiques » : une domination hégémonique
En Afrique, le parti mozambicain Frelimo est l'un des rares partis qui a su se maintenir au pouvoir depuis l’indépendance du pays en 1975. Malgré de nombreuses crises internes et externes, il continue de gouverner le Mozambique sans partage et a remporté toutes les élections « démocratiques » depuis 1994.
Après dix années de guerre d’indépendance (1964-1974), le Front de Libération du Mozambique (Frelimo) a pu accéder au pouvoir et s’imposer comme le seul parti autorisé dans le système politique mozambicain.
La fin de la guerre froide et le quasi-effondrement de l'État mozambicain en raison de l'intensité de la guerre civile, à laquelle s’ajouta une succession de sécheresses, contraignirent les « marxistes » à l’adoption de réformes démocratiques et libérales cosmétiques (adoption d’un programme d'ajustement structurel, abandon de l'idéologie marxiste-léniniste en 1989, promulgation d’une constitution instaurant le multipartisme en 1990, etc.).
Le processus de démocratisation initié dans les années 1990 avait comme but principal de mettre un terme à la guerre civile et fut à ce titre un succès à double tranchant qui a posé les bases de la résilience du Frelimo. En effet, alors qu’il mettait en place des institutions démocratiques, le Frelimo a construit un Etat dont le fonctionnement repose, jusqu'au plus bas niveau de l'administration, sur des agents fidèles aux orientations du parti, et il s’est efforcé à reprendre le contrôle d'une grande partie des zones rurales tenues par la Renamo (Résistance nationale mozambicaine) durant la guerre civile. Avec trente ans de recul, la démocratisation au Mozambique peut être considérée comme un instrument de reconstruction de l'hégémonie du Frelimo dans un contexte d'après-guerre civile.
Cette étude analyse les ressorts de la pérennité de la domination du Frelimo dans un système de démocratie constitutionnelle qui laissait présager le déclin du parti de l’indépendance. Malgré les mauvais résultats économiques, la crise de la dette, une corruption endémique, la violence électorale et politique, le Frelimo continue d’être le parti dominant. Cet apparent paradoxe s’explique par sa double emprise sur l’Etat et l’économie.
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