Après Paris et San Bernardino, le terrorisme dans le débat américain
Les attentats du 13 novembre à Paris et l’attaque de San Bernardino du 2 décembre ont ravivé aux États-Unis le fantôme de la menace terroriste.

Les autorités comme l’opinion publique ont été affectées par l’agression subie par Paris, ville que tous connaissent. Le président Obama a insisté lors de la visite de François Hollande à Washington le 24 novembre sur le fait que les Américains étaient « tous Français ». Les Américains ont par ailleurs été pris de court en comprenant que la fusillade de San Bernardino, qui ressemblait à tant d’autres aux États-Unis, relevait en fait d’un mobile lié au terrorisme islamiste même si, à l’inverse de la tragédie parisienne, aucun lien opérationnel ne paraît pouvoir être établi avec l’État islamique.
Comme cela avait été le cas après les attentats de janvier, les observateurs américains ont pointé du doigt les carences politiques et sécuritaires[1] européennes (coopération en matière de renseignement, contrôle aux frontières extérieures de l’espace Schengen, financement du terrorisme, etc.) qui ont facilité la préparation et la conduite des attaques. Une lecture plus centrée sur la France insistera sur les ressorts sociaux conduisant des nationaux à la radicalisation. La vision d’une laïcité française « idéologique »[2], stigmatisant la minorité musulmane et éloignant certains de ses éléments de la République n’est jamais très loin.
Mais il y a aussi une dimension proprement américaine dans l’analyse des derniers événements, qui prend place dans un contexte de crispation sécuritaire. Elle n’emporte pas pour le moment d’évolution pratique dans la stratégie de l’administration, mais les récentes attaques occupent une large place dans le débat public – avec, comme en France, une évidente poussée du populisme –, et s’annoncent comme un des enjeux des présidentielles de novembre 2016.
Le retour de l’anxiété sécuritaire
L’opinion américaine a de nouveau peur. C’est ce qui semble ressortir des sondages réalisés après les attaques de Paris. Selon une enquête produite pour le Washington Post et la chaîne ABC[3], 81 % des personnes interrogées jugent probable qu’une attaque terroriste causant la mort d’un grand nombre d’Américains survienne dans un futur proche. Quoique les Américains partagent majoritairement ce sentiment depuis le 11 Septembre, ce chiffre est en forte augmentation par rapport au creux constaté par le même institut de sondage en mars 2011 (63 %). La confiance dans la gestion par l’administration de la menace terroriste est, à l’inverse, en baisse significative : 40 % seulement des sondés l’approuvant (contre 69 % en février 2011).
Le soutien de l’opinion à des opérations militaires au Moyen-Orient se redresse de façon parallèle à la crainte des attentats terroristes : 73 % des Américains soutiendraient un renforcement de la stratégie militaire américaine contre l’État islamique, même si près des deux tiers de cette majorité sont favorables à un rôle de soutien plus que de leadership ; 77 % des Américains interrogés seraient de leur côté favorables aux frappes aériennes et 60 % soutiennent un usage plus intensif de troupes au sol, contre 30 % seulement en juin 2014. Parallèlement, 33 % des personnes sondées soutiendraient même l’envoi massif de troupes au sol.
Poursuivez la lecture en téléchargeant le fichier ci-dessous
[1]. Stephanie Pezard, “France is Right to Stay the Course”, The Rand Blog, 25 novembre 2015, 2015,
disponible sur : <www.rand.org/blog/2015/11/france-is-right-to-stay-the-course.html>.
[2]. Gordon Adams, “France Has Been No Friend to Muslims”, Foreign Policy, 17 novembre 2015, 2015,
disponible sur : <http://foreignpolicy.com/2015/11/17/france-has-been-no-friend-to-muslims>.
[3] Sondage, “Terrorism Fears Rise Post-Paris; Most Back Force, Oppose Refugees”, ABC News/Washington Post, 20 novembre 2015, disponible sur : <www.langerresearch.com/wp-content/uploads/1173a1AfterParis.pdf>.
Contenu disponible en :
Régions et thématiques
ISBN / ISSN
Utilisation
Comment citer cette publicationPartager
Téléchargez l'analyse complète
Cette page ne contient qu'un résumé de notre travail. Si vous souhaitez avoir accès à toutes les informations de notre recherche sur le sujet, vous pouvez télécharger la version complète au format PDF.
Après Paris et San Bernardino, le terrorisme dans le débat américain
Centres et programmes liés
Découvrez nos autres centres et programmes de rechercheEn savoir plus
Découvrir toutes nos analyses2001-2025 : guerre globale contre le djihadisme
Malgré des moyens considérables dédiés à la guerre globale contre le terrorisme, la menace djihadiste n’a pas disparu.
L’Iran face à ses limites : 10 points sur les causes structurelles d’une cassure tactique
Proxies régionaux. Soutien de Moscou. Latence nucléaire. Dissuasion balistique. L’équilibre sur lequel Téhéran avait bâti sa doctrine a chancelé — avec une rapidité impressionnante. Une semaine après l’annonce d’un cessez-le-feu entre l’Iran et Israël, il est possible de dresser un bilan détaillé des raisons structurelles qui ont permis à Tel Aviv de déjouer les plans de la République islamique et de dégager des perspectives.
Repenser la fonction « Protection – Résilience ». Un nécessaire changement de paradigme face à un environnement qui se durcit
La France comme les autres pays européens est confrontée de manière directe, tout particulièrement depuis le début de la guerre en Ukraine, à une stratégie hybride de déstabilisation mise en œuvre par la Russie. Cette stratégie se matérialise dans l’ensemble des champs et des milieux possibles d’affrontement et a pour objectif, outre de saper le soutien occidental à l’Ukraine, d’affaiblir les pays européens avec lesquels la Russie se perçoit dans une confrontation systémique de long terme.
Réformer les commandements de l’OTAN. Entre européanisation, émergence de nouveaux leaders et rôle des États-Unis
Au moment où le Sommet de l'OTAN se tient à La Haye du 24 juin au 25 juin 2025, la réélection de Donald Trump à la présidence américaine interroge profondément la nature du lien transatlantique. Si les garanties de sécurité de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), article 5 et dissuasion nucléaire notamment, ne sont pour l’instant pas officiellement remises en cause ou amoindries, des projets de la nouvelle administration portent sur le désengagement de fonctions au sein de l’Alliance, en particulier le poste de SACEUR (Supreme Allied Commander Europe).