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"Une capitale restera toujours une capitale" : l'essor de Konya sous l'AKP

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Aux élections législative et présidentielle de mai 2023, le Parti de la Justice et du Développement (AKP) a enregistré l’un de ses meilleurs scores à Konya, confirmant le soutien de cette ville centre-anatolienne à l’islam politique turc. Longtemps marginalisée dans un espace provincial peu connecté aux centres de pouvoir, Konya est pourtant devenue avec l’AKP un « tigre anatolien ».

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Musée de Mevlana, Derviches Tourneurs Soufis - Konya, Turquie, 29 juillet 2012
Musée de Mevlana, Derviches Tourneurs Soufis - Konya, Turquie, 29 juillet 2012
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Avec 73 % des voix obtenues lors du deuxième tour de l’élection présidentielle de mai 2023, Recep Tayyip Erdoğan a réalisé dans la province de Konya l’un de ses meilleurs scores, augmentant au passage le nombre de ses électeurs par rapport à 2018 (y compris au premier tour). Ce résultat témoigne du soutien massif de la population locale au gouvernement et au Parti de la justice et du développement (Adalet ve Kalkınma Partisi – AKP), alors même que le président se retrouvait pour la première fois mis en ballottage au niveau national, sur fond de mauvaise gestion du terrible séisme de février 2023 et de crise économique rampante. Peu d’analystes prévoyaient un tel succès de l’AKP, largement annoncé comme en recul, y compris dans ses bastions. Or, à Konya, les sièges perdus par le parti d’Erdoğan aux élections législatives sont allés à son allié ultranationaliste, le Parti d’action nationaliste (Milliyetçi Hareket Partisi –MHP) ; autrement dit sans aucun progrès pour l’opposition.

C’est pour mieux comprendre cet ancrage local de l’AKP et de ses alliés que le Programme Turquie/Moyen-Orient de l’Ifri s’est rendu dans la ville de Konya en mai 2023, concomitamment avec le double scrutin présidentiel et législatif : il s’agissait d’y rencontrer, en amont du scrutin, des représentants du secteur économique et des acteurs politiques de la ville pour comprendre les spécificités de cette dynamique. La présente étude, nourrie des observations d’une seconde mission post-élections, est le prolongement de ce travail de recherche. Elle vise à comprendre les raisons du succès ininterrompu de l’AKP dans une province qui lui est fidèle contre vents et marées depuis des décennies, celle de Konya, une ville reculée d’Anatolie centrale (İç Anadolu) moins étudiées que d’autres grandes villes telles que Istanbul ou Ankara. Pourtant, cette province est l’une des plus peuplées de la Turquie, ses 2 300 000 habitants la plaçant en sixième place du classement derrière Antalya et devant Adana. Elle en est également la plus vaste, avec une superficie comparable à celle de la Suisse ou des Pays-Bas (41 000 km2).

Le poids de l’islam politique à Konya, dans laquelle s’inscrit la performance de l’AKP de nos jours, n’est pas nouveau. Le fondateur de l’islamisme turc, mentor d’Erdoğan et premier des Premiers ministres islamistes qu’a connus la Turquie (1996-1997), Necmettin Erbakan, y a été élu député dès 1969, et la mairie métropolitaine de la ville est restée depuis 1989 aux mains du parti islamiste dominant (le Refah, puis le Fazilet, et enfin l’AKP depuis 2002). Ce succès s’explique par la sociologie de la ville connue pour être l’une des plus conservatrices de Turquie, mais aussi par l’alliance au niveau local entre des entrepreneurs efficaces (les « tigres anatoliens ») et les formations politiques islamistes : ces dernières recrutent parmi les dirigeants de petites et moyennes entreprises (PME) et, une fois parvenues au pouvoir, servent leurs affaires en retour grâce aux ressources conférées par l’institution municipale. Les équipes municipales mobilisent par ailleurs les politiques sociales au profit de réseaux clientélistes pour assurer leur maintien au pouvoir. Enfin, le niveau local constitue un marchepied vers des positions institutionnelles nationales pour les partis islamistes, notamment par l’acquisition d’une légitimité gestionnaire et la formation d’un personnel professionnalisé. Ces schémas d’entraide sont la condition d’une métamorphose économique et sociale qui garantit l’ampleur et la solidité de l’ancrage de l’AKP.

 

Cette publication est disponible en anglais : "Une capitale restera toujours une capitale" : l'essor de Konya sous l'AKP 

 

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ISBN / ISSN

979-10-373-0847-4

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"Une capitale restera toujours une capitale" : l'essor de Konya sous l'AKP

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Auteur(s)
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Elisa DOMINGUES DOS SANTOS

Intitulé du poste

Chercheuse associée au Programme Turquie/Moyen-Orient et au Centre Afrique subsaharienne de l'Ifri

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Dorothée SCHMID

Intitulé du poste

Responsable du programme Turquie/Moyen-Orient de l'Ifri

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Mosquée Süleymaniye, Istanbul, Turquie
Programme Turquie/Moyen-Orient
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Le programme Turquie/Moyen-Orient de l’Ifri fournit une expertise sur l’évolution des systèmes politiques, des sociétés et des économies de la région. Il se focalise d’une part sur les évolutions en Turquie et au Levant (influences turque et iranienne, risque de morcellement des États de la région, recompositions diplomatiques), et également au Maghreb (insertion du Maghreb dans les circuits mondiaux, relations politiques et économiques avec l’Europe et avec l’Afrique sub-saharienne…).

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Turquie
Programme Turquie 2050
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Le Programme Turquie 2050 développe une analyse prospective sur le pays afin d’y anticiper les dynamiques des 30 prochaines années. La réflexion se structure autour de trois thématiques : 
•    la politique intérieure, afin d’évaluer la solidité du régime AKP et les perspectives d’alternance ;
•    l’économie, pour comprendre la capacité de rebond de la Turquie, l’évolution de son modèle productif et ses perspectives d’intégration régionale ; 
•    la politique étrangère, pour suivre la montée en puissance de la diplomatie et de l’outil militaire, et cartographier les nouvelles zones d’influence de la Turquie.

Cette recherche, financée par des entreprises et des institutions actives en Turquie, s’appuie sur des missions de terrain qui tentent d’éclairer les points aveugles et les espaces méconnus du périmètre turc. Les partenaires du programme bénéficient d’un suivi personnalisé des indicateurs pertinents pour prendre leurs décisions, grâce à une veille stratégique mensuelle, des notes sectorielles, et la mise à disposition d’un réseau d'experts turcs et français. L’ensemble des échanges autour du programme visent à cerner in fine la notion de  « risque turc » au sens large, afin d’y adapter nos méthodes de travail. 

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La France a-t-elle encore une politique arabe?

Date de publication
03 mai 2024
Accroche

Dès la fin de la guerre d’Algérie, la France a systématiquement repris contact avec les pays arabes qui avaient rompu les relations diplomatiques au moment de la malheureuse expédition de Suez de 1956. Ainsi se sont renouées ou nouées des relations actives et souvent confiantes, y compris avec des pays où elle était absente, comme les émirats du Golfe. Le président Chirac a voulu formaliser et conforter cette orientation lorsque le 6 mars 1996, à l’université du Caire, il a évoqué la « politique arabe et méditerranéenne » de la France. Par-delà quelques principes communs, il s’agissait naturellement d’une politique à géométrie variable selon les pays, avec la volonté d’être présent dans cet ensemble de pays qui sont nos voisins proches, situés dans une zone stratégique et dont d’importantes communautés vivent en France. Très tôt attachée à contribuer à la paix entre Israël et les pays arabes, la France prône une politique équilibrée entre le maintien de la sécurité d’Israël et le soutien du processus de paix israélo-palestinien qui donnerait le droit à l’autodétermination des Palestiniens et à la création d’un État. À cet égard, l’année 2007 représente une rupture due à l’arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy qui sur ce plan, comme sur d’autres, a pris le contre-pied de son prédécesseur. Depuis lors, la politique de la France dans cette région n’a plus la même priorité, réagit plus qu’elle n’agit et semble flotter entre une volonté de maintenir ses liens avec les pays arabes et une certaine complaisance à l’égard d’Israël.

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France/Maghreb : une relation tumultueuse

Date de publication
03 mai 2024
Accroche

Les relations avec le Maghreb, anciennes et marquées du sceau de la colonisation, restent difficiles alors qu’il s’agit pour la France d’une région prioritaire pour sa politique étrangère, où elle continue d’avoir une place majeure dans les domaines politique, économique et culturel, même si celle-ci est en déclin relatif. Le ministère des Affaires étrangères envoie des diplomates confirmés dans ces pays, dont la diaspora installée en France reste très proche. La relation se complique dès lors que le Maroc, l’Algérie et dans une moindre mesure la Tunisie, entrent en conflit. L’objectif de notre politique est d’avoir des relations étroites et confiantes avec ces trois pays, d’où la pression migratoire est forte. La question des visas demeure d’ailleurs un dossier très sensible, comme l’ont montré les vives réactions à la décision française prise en septembre 2021 d’en réduire le nombre de 50 %.

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La renaissance du Parti républicain du peuple (CHP). Phœnix ou chimère ?

Date de publication
24 septembre 2024
Accroche

Sa victoire aux élections municipales turques de mars 2024 a confirmé le Parti républicain du peuple [CHP – Cumhuriyet Halk Partisi] dans son rôle de premier parti d’opposition face au Parti de la justice et du développement [AKP – Adalet ve Kalkınma Partisi], le mouvement islamo-conservateur au pouvoir depuis 2002.

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DOSSIER RAMSES 2025 N° 1 – Moyen-Orient : la recomposition sans fin

Date de publication
04 septembre 2024
Accroche

Au Moyen-Orient, les acteurs directs du conflit semblent incapables d'en revenir à un dialogue politique, tandis que les acteurs voisins manoeuvrent au fil de leurs intérêts d'État, à la recherche d'une introuvable recomposition régionale. Les puissances extérieures pèsent-elles vraiment ?

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Musée de Mevlana, Derviches Tourneurs Soufis - Konya, Turquie, 29 juillet 2012
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"Une capitale restera toujours une capitale" : l'essor de Konya sous l'AKP