DOSSIER RAMSES 2023 : Ordres et désordres africains
L'échec français au Sahel est-il le signe de notre incompréhension de la diversité des logiques africaines ? Traversé des ambitions des grandes puissances du monde, à la fois si proche et inconnu, le Continent noir va peser de manière croissante sur le destin de l'Europe.
Peut-on parler d'Afrique(s) ?, par Camille HABA et Sina SCHLIMMER
L’image d’une Afrique unitaire est le résultat d’un héritage composé pour l’essentiel par le passé colonial, les découpages en États apparemment semblables lors de la décolonisation, et l’imposition de modèles politiques et économiques venus de l’extérieur. La diversité – humaine, sociale, politique et économique – est pourtant la règle, même si se multiplient les tentatives institutionnelles de coordination, et même si globalement l’Afrique est bel et bien tout entière entrée dans la mondialisation.
La croissance démographique au sud du Sahara, par Alain ANTIL
La donnée de la croissance globale de la population de l’Afrique subsaharienne doit être contrebalancée par une analyse de la répartition, très inégale, de cette population. Le sujet même de cette croissance est polarisant : elle ne représente pas forcément un atout économique, et les politiques de freinage conseillées de l’extérieur viennent souvent heurter une douloureuse mémoire coloniale. Les rapports sociaux évoluent cependant (conception du mariage, urbanisation) et peuvent constituer la matrice de changements à venir.
Diversité et recompositions religieuses en Afrique subsaharienne, par Cédric MAYRARGUE
La carte religieuse de l’Afrique exprime surtout la diversité : d’une partie à l’autre du continent, selon les héritages historiques, d’un État à l’autre… Ces contrastes se complexifient de nombreuses références religieuses et en évolution constante. Les acteurs du fait religieux se multiplient, évoluent avec les sociétés, s’investissent davantage dans l’éducation ou la communication, gagnant, avec ou sans l’appui d’acteurs extérieurs, de nouvelles capacités d’influence sociale et politique.
La France face à l'échec sahélien, par François GAULME
Au-delà des coups portés au djihadisme, la présence française au Sahel n’a pas réussi à assurer la sécurité de sociétés fragiles et se heurte désormais à une opposition locale soutenue par les manoeuvres russes. Le soft power français est atteint, en même temps qu’est questionnée l’efficacité du dispositif militaire et de l’aide au développement qui l’accompagne. La France garde cependant des cartes efficaces, à condition qu’elle sache redéployer son dispositif et le concentrer sur l’Afrique de l’Ouest.
Mali, année zéro, par Alain ANTIL (voir la vidéo)
La série de coups d’État intervenue au Mali signe l’échec du pouvoir civil à reprendre le contrôle de son propre territoire. Mais les juntes successives ne donnent nullement aux Forces armées maliennes l’efficacité requise : ces dernières sont, au contraire, un élément central du problème. Le dernier coup d’État a confirmé un revirement diplomatique symbolisé par l’appel au groupe russe Wagner. Défiance régionale et oppositions internes à la société malienne se mêlent en un composé dangereux.
Corne de l'Afrique : une déstabilisation à deux échelles, par Élisa DOMINGUES DOS SANTOS
L’espoir né de la réconciliation Éthiopie-Érythrée a fait long feu. Rivalités interétatiques et conflits internes se renouvellent. Tous les grands acteurs régionaux et mondiaux sont désormais présents dans une région jugée stratégique. Face aux défis existentiels, l’organisation régionale est défaillante.
À quoi sert l'Union africaine ?, par Benjamin AUGÉ et Félicité DJILO
En succédant à l’Organisation de l'unité africaine (OUA), l’Union africaine (UA) entendait suivre le modèle européen pour construire une communauté politique des États du continent. Mais l’aspiration à l’unité n’a pas permis de bousculer l’affirmation des souverainetés. Les institutions de l’UA souffrent de leur faiblesse par rapport à des États surtout obsédés par la sauvegarde de leur propre marge de manoeuvre politique. L’application des principes se fait donc différenciée, au fil du poids des États et des influences régionales.
Comprendre les engagements russes en Afrique, par Arnaud KALIKA
La Russie réinvestit l’Afrique, ranimant la mémoire des engagements de l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS). Le réengagement est d’abord économique, puis très vite stratégique : il s’agit de briser l’isolement russe et d’éliminer la présence occidentale, par tous les moyens : accords de sécurité, groupe Wagner, moyens de propagande…
La Turquie en Afrique, par Élisa DOMINGUES DOS SANTOS
Investissement économique et affirmation diplomatique, l’action turque en Afrique subsaharienne est devenue un axe majeur de la manoeuvre extérieure d’Ankara. Elle s’adjoint désormais une présence sécuritaire plus visible. Au seuil d’une année politique importante, son activisme africain peut être revendiqué comme un succès par le Parti de la justice et du développement (AKP).
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