OTAN et PESD : complexités institutionnelles et réalités politiques
Sur le terrain, la relation OTAN/PESD se passe bien. La confusion, politique et fonctionnelle, domine pourtant entre l’Alliance et l’Union européenne. Elle renvoie aux genèses, et aux logiques, très différentes des politiques des deux institutions. Il faut sans doute, pour l’avenir immédiat, préférer les accords ponctuels, secteur par secteur, à une entente générale rendue difficile par la mue accélérée que connaissent aujourd’hui à la fois l’Alliance et l’UE.
Trop souvent, les analystes réfléchissent aux relations entre les deux principaux acteurs de la sécurité dans la zone euro-atlantique en faisant référence à « l’Union européenne (UE) et à l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) ». Ils devraient mieux évoquer la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD) et l’OTAN. Ce point peut paraître mineur : il est crucial. L’Union comme telle n’a pas de relation avec l’Alliance atlantique, et ne devrait pas en avoir. Les deux entités diffèrent dans leur mode d’adhésion, leur essence, leur raison d’être, leurs objectifs, leurs structures, leur fonctionnement, leurs activités, leur histoire. Il est difficile d’imaginer un programme qui leur soit commun. Il existe certes une « relation » entre les activités de sécurité et de défense de l’UE, inscrites depuis 1999 dans la PESD et gérées par le Comité politique et de sécurité (COPS), et l’OTAN, représentée par le Conseil de l’Atlantique nord (CAN). Il existe d’autres interactions dans le cadre général des relations PESD/OTAN, entre responsables politiques et militaires à tous niveaux.
C’est d’ordinaire cette interaction entre PESD et OTAN qui est analysée dans les textes sur « l’UE et l’OTAN ». Analystes et politiques la jugent largement insatisfaisante, voire dysfonctionnelle. La plupart d’entre eux s’accordent à dire qu’il est urgent que la PESD et l’OTAN coopèrent au maximum en tous domaines et à chaque fois qu’elles se trouvent impliquées dans des opérations ; qu’elles doivent éviter de se concurrencer, et qu’une plus grande cohérence et une meilleure synergie entre les deux seraient à la fois logiques et possibles.
Berlin +
Le fonctionnement de la relation PESD/OTAN est régi par les accords Berlin + de 2003. Dans les faits, ils fonctionnent plutôt bien sur le terrain – c’est-à-dire, à l’heure actuelle, seulement en Bosnie-Herzégovine. Dans ce cas, par exemple, le commandant en second des forces de l’OTAN en Europe, en tant que commandant de l’opération EUFOR Althea, interagit régulièrement avec le Comité politique et de sécurité de l’Union européenne et assure la liaison entre le COPS et le CAN. Les secrétaires généraux de l’UE et de l’OTAN se rencontrent au moins une fois par mois pour résoudre les problèmes de complémentarité entre les deux entités et leurs missions. Des équipes de liaison sur le terrain sont chargées d’harmoniser les relations entre les personnels et des représentants des deux côtés sont en contact quotidien sur le terrain.
PLAN DE L’ARTICLE
- Berlin +
- Confusion politique, fonctionnelle et institutionnelle
- Des origines historiques et des trajectoires différentes
- La politique de sécurité collective et de défense
Jolyon Howorth, professeur à l’Université de Yale (USA) et Jean Monnet Professor of European politics à l’université de Bath (UK), est chercheur associé à l’Institut français des relations internationales (Ifri, Paris).
Texte traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Elsa Paroissien.
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