France-Pologne : un rapprochement diplomatique dépendant des aléas électoraux
Des convergences de vues entre Paris et Varsovie ont abouti à un traité de coopération inédit, signé le 9 mai. Le réchauffement des relations, qui reste encore à concrétiser, pourrait être atténué par la victoire du candidat conservateur à l’élection présidentielle polonaise de dimanche.
« Il y a un côté “catalogue à la Prévert”, qui démontre que les intérêts ne sont pas tout à fait communs, constate Amélie Zima, chercheuse au Centre des études de sécurité de l’Institut français des relations internationales (Ifri). Un exemple est frappant: le traité évoque une base industrielle et technologique de défense européenne, mais le programme d’armement de la Pologne se fait à travers des commandes aux États-Unis et à la Corée du Sud, car la France n’est pas capable de livrer les classes d’équipements souhaités par Varsovie. » Certains sujets sont aussi évités. C’est le cas du nucléaire militaire, alors qu’Emmanuel Macron a répété être «prêt à la discussion» d’un élargissement à l’Europe de la dissuasion nucléaire française.
Pour les Polonais, il est décevant que cette question ne soit pas mentionnée dans le traité. Un analyste du pays a parlé de “parapluie nucléaire de Schrödinger” pour souligner que cette proposition pouvait alternativement être considérée comme existante ou non existante. Varsovie attend des gestes concrets, quand Paris en est encore à dire que la Pologne doit “apprendre la grammaire nucléaire française”, ce qui est condescendant.
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Côté français, Macron a été dessillé quant à la radicalité de la posture de Vladimir Poutine. « À la charnière de l’année 2022-2023, analyse le chercheur Dimitri Minic dans une note pour l’Ifri, […] le président français a opéré une lente transformation » de la stratégie diplomatique vis-à-vis de la Russie, en assumant de plus en plus clairement le rapport de force. Le discours tenu par le chef de l’État à Bratislava (Slovaquie), le 31 mai 2023, en a été une confirmation.
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« Les Polonais achètent des F-35 [un avion de combat américain –ndlr], car c’est aussi la seule façon d’avoir des bombes nucléaires sur le sol dans le cadre du parapluie assuré par Washington, explique Amélie Zima. En face, le discours français en matière de dissuasion n’est pas encore perçu comme suffisamment clair. »
De façon générale, le gouvernement de Tusk entend profiter des divers cadres possibles pour assurer la sécurité du pays. La coopération avec la France en fait partie, mais il n’est pas question de s’enfermer dans un quelconque tête-à-tête. « On assiste notamment, remarque Amélie Zima, à l’émergence d’une structure de coopération régionale vers le nord-est de l’Europe, avec la Suède et la Finlande, qui ont récemment rejoint l’Otan et ont la même perception de la Russie, ainsi que les pays Baltes. Des programmes d’infrastructures et militaires concrets ont été lancés. »
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