La France face aux Nouvelles routes de la soie chinoises

Le projet dit des « Nouvelles routes de la soie de la Chine » (ou « Une ceinture, une route », « Ceinture et route », « Belt and Road Initiative » en anglais – désigné « B&R » dans cette étude) lancé en automne 2013, est l’une des priorités du président Xi Jinping, qui a placé le concept au cœur de la politique intérieure et extérieure du pays. Le projet pourrait même rester d’actualité jusqu’en 2050, pour le centenaire de la République populaire de Chine (RPC), qui constitue une échéance importante pour le Parti communiste chinois (PCC).

Si le projet interpelle par son ampleur géographique (plus d’une centaine de pays et d’institutions concernés – selon les déclarations officielles) et sectorielle (transports, énergie, télécommunications, finance, tourisme, culture…), il se distingue surtout par sa méthodologie. Car la méthodologie de B&R est peu commune : le concept a été lancé avant même que son contenu précis n’ait été défini et les partenaires de la Chine sont depuis fréquemment encouragés à fournir des idées quant à la manière de le concrétiser. Il est difficile d’identifier un projet qui a été lancé par un État au cours des dernières décennies avec autant de détermination, autant d’investissement dans sa promotion nationale et internationale, mais aussi avec autant d’ambiguïté. Le projet, en constante évolution, est promu selon des méthodes de communication et de mise en œuvre habituellement employées en Chine, mais jamais, avec cette ampleur, à l’international. Face à la nouveauté de l’approche, et la rapidité avec laquelle le projet a gagné en notoriété, de nombreux acteurs français et européens apparaissent déstabilisés.
C’est cette approche si particulière de B&R – jusqu’à présent peu analysée – qu’il apparaît aujourd’hui indispensable de comprendre, afin d’éclairer l’analyse stratégique et la prise de décision des pays concernés par le projet chinois, dont la France. En quoi consiste l’approche chinoise et quelles en sont les intentions ? Compte tenu de ses spécificités, quelle approche française et européenne serait la plus appropriée pour y faire face ?
Objectifs
L’objectif de cette étude n’est pas d’examiner des projets spécifiques, ce qui a été l’objet de nombreuses publications antérieures – y compris par l’équipe de recherche – ni de répertorier les projets B&R à un instant « t », objectif de plusieurs cartes interactives. Il s’agit plutôt d’analyser l’approche développée par la Chine au cours des cinq dernières années, depuis le lancement du projet, pour suggérer les pistes à envisager afin d’y répondre de la meilleure façon possible. Même si le projet chinois demeure flou à de nombreux égards, l’analyse peut désormais, en 2018, être précisée grâce aux cinq années de recul dont nous disposons depuis son lancement.
Cette étude apporte donc des éléments de clarification concernant l’approche chinoise – les objectifs mais aussi les modalités de mise en œuvre et la méthodologie générale employée (cf. « Belt & Road : méthode et objectifs ») – afin d’identifier et analyser les risques et opportunités qu’elle pose pour la France. La prise en compte de cette méthodologie est particulièrement utile pour comprendre la manière dont les acteurs français peuvent être sollicités par le projet chinois, aujourd’hui et dans l’avenir, et la façon dont ils peuvent y répondre.
L’approche française et européenne – approche gouvernementale mais aussi du secteur privé (cf. « Positions de la France et de l’Union européenne ») – ainsi que les réactions de pays clés, tels que les États-Unis, le Japon, l’Inde, la Russie ou encore les pays d’Asie du Sud-Est (cf. « Positions de pays clé ») face à B&R sont ensuite examinées.
S’appuyant sur cette analyse, trois scénarios d’évolution du projet chinois sont élaborés (cf. « Scénarios ») : 1/ développement continu de B&R générant une nouvelle forme de mondialisation, 2/ développement contenu de B&R se heurtant à d’autres formes de mondialisation : retour d’une bipolarisation internationale, 3/ essoufflement et étiolement de B&R. En conclusion, des recommandations générales (cf. « Éléments de recommandations ») sont formulées quant à l’approche à adopter face au déploiement du projet chinois dans les prochaines années, selon les scénarios envisagés.
Méthodologie
Les scénarios constituent le cœur de ce travail de recherche, qui a été conçu dès le départ comme un exercice continu de réflexion et d’analyse prospective, et qui a été alimenté tout au long du processus par 5 séances de brainstorming réunissant à Paris, outre l’équipe de recherche, différents acteurs français directement concernés par le projet chinois (représentants des ministères concernés, d’entreprises, des collectivités locales…). Ces séances ont notamment permis de partager les questionnements et les différentes perceptions existant entre acteurs, et ont mis en évidence une convergence progressive entre les différentes perceptions françaises du projet chinois.
L’étude a également été élaborée sur la base de l’analyse des publications chinoises sur le sujet (plans d’action gouvernementaux, dépêches de l’agence Chine nouvelle, articles de think tanks et universités) et de terrains de recherche effectués en Asie et en Europe au cours de la période 2017-2018 – avec une attention particulière accordée aux échanges avec les acteurs chinois d’une part, et les acteurs français et européens d’autre part.
La présente étude est conçue comme un exercice de réflexion en soi, comme un brainstorming qui permet d’identifier les questions d’importance pour la France et l’Europe, mais aussi les angles morts et les évolutions possibles du projet chinois. Nous espérons que la lecture de l’étude suscitera de nouvelles interrogations et incitera les lecteurs à poursuivre leur réflexion dans le même esprit que celui qui a animé l’étude.
Nous tenons à remercier vivement le CSFRS pour son soutien, sans lequel ce projet n’aurait pas pu voir le jour.
Contact :
Alice Ekman, responsable des activités Chine à l'Ifri - [email protected]
Natacha Crance, responsable de la communication - [email protected]
Dimitri Von Büren, chargé de communication digitale - [email protected]
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